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Source: Article original écrit par Alexandra Spasov  de Capitana

Au-delà de la tendance ESG

Investir en accord avec sa conscience, c’est possible et il existe plusieurs niveaux d’investissement durable. Du plus simple au plus compliqué 😉

On décortique pour vous l’univers de l’investissement vert, durable et propre, sans « greenwashing » *.

*le greenwashing est une stratégie de communication et de marketing adoptée par des entreprises ou autres organisations. Elle consiste à mettre en avant des arguments écologiques pour se forger auprès du public une image éco-responsable, alors que la réalité des faits ne correspond pas. 

Si vous débutez dans l’investissement, vous vous demandez sûrement quelle est la différence entre un placement traditionnel et un placement dit « responsable ».

L’investissement responsable prend en compte des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) en plus des critères financiers là où les investissements traditionnels sont basés uniquement sur des critères de rendement et de risque financier.

L’activité des entreprises a souvent un impact négatif sur notre environnement. Pollution de l’air, de l’eau ou encore déforestation ne sont que quelques exemples. Cette prise de conscience a modifié le comportement de bon nombre d’investisseurs. Certains ont décidé de prendre en compte également des éléments extra-financiers pour juger de la performance d’une entreprise.

Vous l’aurez compris, l’heure est plus que jamais à l’investissement durable et responsable. Voici plusieurs manières d’aborder cette problématique et comment elles fonctionnent.

Avoir une approche ESG

Trois critères de base pour les investissements ESG: 

E: Les risques environnementaux

Les investissements durables mesurent l’impact de l’entreprise sur la gestion des ressources et la prévention de la pollution, ce qui inclut la réduction des émissions de gaz à effet de serre et l’impact sur le climat.

S: Les risques sociaux

Ce critère s’attache à mesurer l’impact des investissements sur la société et les facteurs humains. En favorisant les entreprises qui investissent dans la santé et la sécurité de leurs collaborateurs, mais aussi en encourageant celles qui développent des relations positives avec leurs partenaires sociaux et protègent les droits de l’homme.

G : Les risques de gouvernance positive ou négative

Ce dernier critère fait référence à la façon dont les entreprises sont gérées. Il consiste à analyser la capacité d’une entreprise à être indépendante, mais aussi son aptitude à gérer les risques et à opter pour des rémunérations de dirigeants équitables.

Avoir une approche d’exclusion

Une autre approche est d’exclure dès le départ un certain nombre de secteurs considérés comme “controversés”. Pour reprendre l’exemple des énergies fossiles, un fonds “vert” peut décider, au contraire de l’approche “meilleur élève”, de ne pas investir dans les énergies fossiles, même si cela veut dire se priver des bénéfices collatéraux. Les secteurs les plus fréquemment exclus, outre les énergies fossiles, sont ceux de l’alcool, le tabac, l’armement, les OGM ou encore le nucléaire. Au-delà des exclusions sectorielles, un fonds peut décider d’exclure des sociétés qui ne respectent pas certains traités ou normes internationales. On pense par exemple à la déclaration des droits de l’Homme ou les principes du Global Compact des Nations Unies.

Avoir une approche thématique

Certains fonds décident de suivre une autre approche en se concentrant sur certaines thématiques telles que les énergies renouvelables, le vieillissement de la population, la rupture technologique ou encore la diversité de genre. Dans les fonds thématiques durables, les gestionnaires s’éloignent de l’utilisation classique des critères ESG comme gage de qualité des entreprises investies pour se concentrer sur les produits et services que ces sociétés proposent.

En résumé

 Les critères ESG sont avant tout utilisés dans une logique de gestion du risque plutôt que dans une logique “d’intention”. Concrètement, un fonds “ESG” cherche à minimiser le risque que ses investissements soient un jour au coeur d’une crise liée aux facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance. L’impact positif est une conséquence plus qu’une volonté pro-active des équipes de gestion qui restent concentrées sur une approche purement financière des investissements.

L’approche thématique s’éloigne déjà plus de cette approche purement financière avec une vraie intention dans le choix des investissements en se concentrant sur les produits et services qui serviront leur thématique d’investissement.

Les labels ESG sont donc plus un indicateur de gestion du risque ESG qu’un indicateur de durabilité ou d’impact positif. C’est un fait, pas un jugement de valeur. C’est déjà un grand pas en avant par rapport à la finance traditionnelle qui s’intéresse uniquement au rendement et à la performance. Pour une grande partie des investisseurs, cela suffira. 

Pour donner du sens à ses investissements il faut aller au-delà et creuser plus avant dans les stratégies d’investissement des différents fonds.

Les obligations vertes

Les obligations vertes ou Green Bonds existent depuis quelque temps, elles ont été lancées en 2008 par la Banque Mondiale suite à l’appel inattendu d’un groupe suédois (si vous vous demandez ce qu’est une obligation). 

À la différence des obligations traditionnelles qui sont basées uniquement sur les taux et la volatilité, les obligations vertes prennent en compte les aspects environnementaux des investissements effectués. Elles permettent par la suite de financer des projets qui participent à la lutte contre le réchauffement climatique ou qui permettent le développement d’une économie durable.

Concernant les acteurs, ils sont assez variés. Il s’agit principalement de grandes institutions comme la Banque Mondiale qui en est à l’origine. Mais il peut également s’agir d’acteurs privés, Apple en est l’exemple : en 2013 la marque a émis des obligations vertes afin de devenir leur propre fournisseur d’énergies renouvelables !

Et depuis 2017, ce sont les Etats qui s’y sont intéressés. La France a émis la plus grande obligation verte d’un montant de 7 milliards d’euros. Des fonds d’investissement investissent exclusivement dans ce genre d’obligations pour les rendre accessibles à tous les investisseurs.

Les labels… faire confiance à l’étiquette?

Comprendre quels indicateurs regarder, faire le tri dans les données disponibles, analyser les différentes offres d’investissements, les comparer…tout cela requiert beaucoup de temps et d’énergie.

C’est là qu’interviennent les labels. Ils permettent à l’investisseur privé et pressé de bénéficier d’une analyse poussée effectuée par ces labels pour investir dans ce qu’il recherche en toute confiance…en théorie. En pratique, la réalité est plus compliquée.

Quels labels existent aujourd’hui ?

Pas moins de sept organismes de labellisation existent au niveau européen pour la finance durable. Chaque organisme a ses propres critères et sa manière de considérer l’impact des fonds labelisés.

Au sein de chaque label, les standards ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) sont différents et les méthodes d’application des critères ESG au sein de la gestion des fonds est également très hétérogène, ce qui rend les comparaisons compliquées de prime abord.

Ensuite, la création de labels qui a été initiée par plusieurs pays, notamment le Luxembourg avec leur certification Luxflag. Elle a été lancée en 2017 et permet de rassurer les investisseurs sur les projets qu’ils financent.

Le label est attribué à un projet après une analyse selon plusieurs critères.

Le Luxembourg a également mis en place un espace consacré aux obligations vertes : la plateforme Luxembourg Green exchange .

Elle a été lancée en 2016  en raison de la forte demande de financement durable qui émergea suite à la COP 21***. Pour rappel, durant cette conférence il était question de la mise en place de projets de financement durable accessibles à l’épargne privée. 

La plateforme est donc entièrement dédiée aux instruments financiers verts et l’accès est limité aux émetteurs qui respectent certains critères d’éligibilité.

 

Mais il n’est pas le seul! La France a mis en place deux labels :

👉 Un label Investissement Socialement Responsable (ISR) créé par le ministère des finances. Il vous permet de choisir des placements responsables et durables, toujours en intégrant des critères de développement durable dans la gestion d’actifs financiers. (Si vous ne savez plus ce qu’est un actif financier, c’est par ici.)

👉Un label Transition Énergétique et Écologique pour le Climat (TEEC) qui est dédié aux fonds d’investissement. Pour être éligible un projet doit relever d’une activité “verte” et garantir certaines exigences en termes de transparence de l’information, d’impacts environnementaux et sociaux,…

Le crowdfunding, une autre forme d’investissement

Vous avez surement déjà entendu parler du financement participatif ou crowdfunding pour les bilingues.

Cela permet de financer des projets dans différents domaines (social, culturel,…) via une multitude de plateformes en ligne.

Si vous avez l’envie de rendre notre planète plus verte grâce à ce moyen, il existe de nombreux projets qui y contribuent et des plateformes se spécialisent même dans le crowdfunding éthique et durable. 🌱

C’est le cas de Blue Bees ou encore Lita qui favorisent des projets à fort impact environnemental et social (création de panneaux solaires Thermovoltaïques ou encore la protection des abeilles.)

Que vous soyez à la tête d’une entreprise déjà bien développée ou une entrepreneuse pleine d’idées, il est possible de lancer une campagne de crowdfunding. Il suffit juste de bien choisir la plateforme et le mode de financement, car oui il en existe plusieurs!

Il peut s’agir de:

👉 don avec ou sans contrepartie.

👉 prêt avec ou sans intérêts.

👉 d’investissement en titres (obligations, actions, ou redevances****).

Comme pour les obligations vertes, la France a mis en place un label: celui du financement participatif de la croissance verte. Il est similaire au label TEEC en terme de procédures et d’engagement.

Vers une homogénéisation et “normalisation” de la finance durable

Comme expliqué plus haut, le problème de lisibilité des labels pour les investisseurs privés est qu’il n’existe pas de norme reconnue concernant la qualification ESG. Pour répondre à ce problème, l’Union Européenne a mis en place un plan sur plusieurs années afin de forcer les fonds d’investissement et les sociétés de gestion à être plus clair et rigoureux sur la communication ESG. L’objectif est d’éliminer le “greenwashing” et de permettre une vraie comparaison entre différents fonds et produits.

Ce sont le but des nouvelles dispositions de la SFDR (sustainable finance disclosure regulation) qui sont appliquées depuis 2021. Concrètement, un fonds sera soit “neutre”, soit “ESG”, soit “durable” et cette information devra être clairement communiquée aux investisseurs.

Les produits financiers considérés “ESG” dans le SFDR sont des produits qui promeuvent activement des caractéristiques environnementales ou sociales dans la sélection de leurs investissements (classification 8). Les produits financiers “durables” sont des produits qui ont des objectifs d’impact durable concrets qui devront être communiqués et sur lesquels il devront rapporter (classification 9). Ces deux catégories sont soumises à des normes de divulgation plus strictes dans le cadre du SFDR.

Ces standards devraient graduellement réduire la problématique de comparaison et de pouvoir choisir une stratégie qui correspond aux préférences des investisseurs. Cependant, cela ne règle pas encore un autre grand problème de la mesure d’impact : la disponibilité de données pertinentes, de qualité et vérifiées.

En effet, si on considère l’indice MSCI World, un indice communément utilisé pour estimer la performance du marché actions mondial, on constate que la couverture ESG n’est que de 50 %. Autrement dit, les données ESG n’existent que pour 50 % des entreprises présentes dans l’indice. Qui plus est, ces données sont pour la plupart des données fournies par les entreprises elles-mêmes et ne doivent pas toutes être auditées par une source externe.

Bref, il y a encore beaucoup de chemin à parcourir avant de pouvoir se fier “aveuglément” à des labels ou agences de notation pour s’assurer de l’impact positif de son portefeuille.

Conclusion

Pour conclure, retenez que le rendement et la volatilité ne sont pas des paramètres exclus des investissements durables. Ils viennent s’ajouter à une liste beaucoup plus large de critères incluant des nouvelles contraintes écologiques et sociales.

Si vous avez à cœur d’investir en accord avec vos valeurs, l’investissement durable est donc une stratégie à considérer. Et vous ne serez pas la seule, car il s’agit là d’un mouvement global qui favorise le développement d’entreprises responsables.